Le 21 octobre 1933, lettre de Cambridge
21 octobre 1933
Cambridge
Bonjour à tout le monde au Japon,
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J’expérimente présentement une renaissance intellectuelle, ce que toi, Howie, tu as tellement apprécié durant ton séjour ici; je découvre que l’étude de l’histoire révèle de plus en plus de richesse et de nouvelles perspectives avec l’utilisation d’un outil pédagogique aussi raffiné, que celui développé par Marx par exemple.
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Il y a ici en Angleterre un étrange phénomène où certains hommes d’église (ou du moins c’est ce qu’on me dit) ont des opinions communistes ou de la gauche socialiste. […] Pourtant, c’est un endroit dangereux et périlleux pour avoir des opinions socialistes aussi prononcées. Mon propriétaire, qui m’a avoué récemment avec désinvolture qu’il était un communiste, bien que […] je n’aie jamais vu un travailleur si peu se plaindre, dit qu’il a entendu parler de deux ou trois pasteurs qui donnent à tout membre de leur congrégation qui en fait la demande les écrits d'hommes comme Lénine ou Marx. Il serait intéressant d'entendre comment ils arrivent à concilier certaines opinions de Lénine avec certaines prétentions de l’Église, mais c'est une très agréable surprise de trouver des hommes occupant des postes d’influence qui refusent de s'aligner avec les réactionnaires. Mon propriétaire, M. Bell, dit que le virage à gauche parmi les travailleurs est phénoménal depuis que le gouvernement national [une coalition conservatrice] a pris le pouvoir. C’est un drôle de gars, un Anglais jusqu’au bout des ongles, avec des points de vue anglais, qui aime la vie de famille, qui aime sa femme et son enfant, mais à la suite de plusieurs conversations, je pense qu’il est très peu probable que la presse, la radio ou toute autre propagande bourgeoise puisse le duper; il penche fortement du côté de la Russie et il déteste [le premier ministre britannique] Ramsay MacDonald comme seul un communiste peut le faire.
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Affectueusement, Herbert