Cour de la police municipale
(Par-devant l’honorable C. Courteney, magistrat de police)
Jeudi, 24 nov. 1877
Willy Selcalcher ou Ahalt un Indien, a été mis en détention préventive à partir du 23, en instance d’une accusation de meurtre.
La déposition suivante a été faite par J.C. Craine : qu’il avait des raisons de croire que, le 13 décembre 1868, un certain Willy Selcalcher, un Indien Ahalt avait assassiné un certain Giles Curtis d’une manière illégale, malicieuse et criminelle, à Salt Spring Island, en tirant sur lui ledit Giles Curtis et en lui tranchant la gorge.
Henry Sampson a déclaré sous serment qu’il était fermier; qu’en décembre 1868, il agissait comme constable à Salt Spring Island; qu’il connaissait le prisonnier; connaissait Giles Curtis; il se rappelait avoir entendu dire que Giles Curtis était mort et sur l’information reçue s’est alors rendu à la maison d’Estes où Curtis demeurait; là, il a trouvé Curtis étendu sur le plancher, ayant une blessure de fusil à la tempe droite et de la chevrotine sur la poitrine; il avait la gorge tranchée; il a regardé autour de la maison et a trouvé le couteau présenté, maculé de sang ainsi qu’un peu de barbe de la victime; il a également présenté deux plombs retirés de la poitrine de l’homme et un fourreau à fusil indien trouvé sur le plancher, près de la victime; à ce moment-là, il n’y avait personne dans la maison, le corps était rigide et froid; il savait que Curtis possédait une certaine somme d’argent, car il l’a trouvée dans le coffre qui avait été défoncé et dont on avait retiré la plus grande partie du contenu; il croyait qu’il y avait environ 70 $, dans une petite bourse cachée sous des objets sans valeur au fond du coffre; une enquête du coroner eût lieu par-devant John Morely [sic] et le verdict rendu fut que la victime avait été tuée par une personne ou des personnes inconnues.
Howard Estes a déclaré qu’il était fermier; qu’il se rappelait que, le 13 décembre 1868, un nommé Giles Curtis habitait avec le témoin, à Salt Spring Island; l’avait vu vivant, pour la dernière fois, entre 9 et 10 heures, le matin du 13 décembre 1868. Il était retourné à la maison à la brunante, le même jour et, en approchant de la maison, il avait vu son fusil (celui du témoin) à l’extérieur de la maison; le fusil était chargé quand il avait quitté la maison, le matin; le fusil n’avait pas été utilisé; il a regardé à l’intérieur de la maison, mais ne pouvait voir Curtis, il est retourné et s’est rendu à la barrière pensant qu’il pourrait avoir des difficultés avec son fusil et il l’a appelé; il est retourné à la maison et a découvert que Curtis était mort, les pieds vers la porte et la tête vers la fenêtre; le témoin a couru prendre son fusil et s’est rendu chez les voisins en empruntant un sentier; un des voisins est allé dire aux autres ce qui était arrivé; il n’a pu trouver personne pour le raccompagner ce soir-là, car il faisait particulièrement mauvais; il n’est pas retourné avant le lendemain. Au retour, le lendemain matin, avec un voisin et d’autres, ils en sont venus à la décision de fermer la maison jusqu’à ce qu’ils puissent rejoindre M. Morley, mais avant de fermer, ils ont vérifié s’il manquait quelque chose et le témoin s’est rendu compte que son coffre avait été défoncé, le coffre n’appartenait pas au défunt, mais les intrus n’avaient pas aperçu la bourse qui contenait 60 $, ni un porte-feuille contenant un billet à ordre bancaire de 1 500 $. Lorsqu’il est parti, le matin, il y avait douze chemises à motifs imprimés, des taies d’oreiller et un certain nombre d’autres articles, deux nouvelles haches et une poche de farine, et on avait également pris 5 grandes couvertures de lit. Le témoin avait engagé le prisonnier, son épouse et son enfant à Saanich pour transporter ses affaires à Salt Spring Island. Il n’a pas réussi à trouver le fusil de Curtis après le meurtre c’était vers la fin de novembre que les affaires avaient été transportées à Salt Spring Island -- Curtis avait un fusil à canon double qu’il avait acheté d’un certain M. Starks; tant le fusil de Curtis que celui du témoin étaient dans la maison, le matin. Le dimanche avant le meurtre, Curtis était allé à la messe et un Indien et une Indienne étaient venus à la maison. L’Indien était à peu près de la taille du prisonnier et l’Indienne était courte et ressemblait quelque peu à l’Indienne qui se trouve à la cour; l’indien a demandé où se trouvait son tilicum (ami) et il leur dit qu’il reviendrait dans une minute, ils ont dit qu’ils allaient seulement regarder aux alentours.
David Overton, a déclaré sous serment qu’il demeurait à Salt Spring au moment du meurtre; M. Stark lui avait prêté un fusil durant trois ans avant l’arrivée de Curtis et Estes. La crosse du fusil présenté est celle du fusil que le témoin avait emprunté de M. Stark; à la demande de M. Starks il avait remis le fusil à Curtis, peu de temps avant le meurtre.
George Askew a témoigné que le prisonnier avait été mis en détention préventive l’été dernier, soupçonné du meurtre de Richardson à Chemainus et que, discutant de son caractère, un homme a déclaré que si le prisonnier n’avait pas tué Richardson, il savait qu’il avait tué un homme à Salt Spring et a dit qu’une Indienne, la femme du frère du prisonnier, lui avait tout dit à ce sujet et ce qu’ils avaient fait des articles. D’après sa version des faits, l’homme pensa qu’il y avait du vrai et il avait mené sa propre enquête auprès des autres Indiens de Comox et c’est à partir des résultats de cette enquête que le prisonnier était maintenant mis en accusation. L’Indienne avait déclaré que le prisonnier avait d’abord proposé de tuer Curtis et qu’il avait quitté le camp, un matin et que peu de temps après, ils avaient entendu un coup de feu et le prisonnier était revenu, quelques minutes plus tard, avec un fusil et un lot d’autres articles; ils ont alors levé le camp et se sont rendus à New Westminster et finalement à Comox.
L’affaire a alors été ajournée jusqu’au vendredi matin à 10 h, afin de trouver un interprète convenable.